Villes apprenantes, villes d’avenir ?
Créé en 2013, le réseau mondial des villes apprenantes de l’Unesco compte désormais 229 membres issus de 64 pays. Son but est de rendre la vie en ville plus inclusive et plus citoyenne grâce à la formation continue et à l’échange des savoirs.
Quel est le point commun entre Charleroi, Evry-Courcouronnes en France, Tunis ou encore Mayo-Baléo au Cameroun ? Ces villes appartiennent au réseau mondial des villes apprenantes de l’Unesco, lancé en 2013. Encore mal connu, ce réseau rassemble aujourd’hui 229 municipalités à travers 64 pays. La notion de ville apprenante diffère de celle de « ville intelligente » (smart city en anglais) en offrant une vision plus humaine et sociale de la ville et en plaçant l’éducation au centre des politiques et pratiques urbaines. Leur mission, en lien avec les Objectifs du développement durable de l’ONU ? Garantir une éducation de qualité, sans exclusion, équitable, avec possibilités d’apprentissage pour tous tout au long de la vie.
Qu’est-ce qu’une ville apprenante ? Une ville qui encourage et soutient les acteurs de l’éducation formelle (écoles, universités, centres de formation) mais aussi informelle (associations, maisons de quartier) pour mettre à disposition de chaque citoyen les moyens d’apprendre tout au long de son existence. Cela peut passer, par exemple, par de la pédagogie alternative pour les groupes vulnérables, des cours en ligne gratuits pour tous, l’apprentissage intergénérationnel, des services d’orientation professionnelle ciblant les femmes pour les encourager à obtenir des niveaux de qualification plus élevés et des postes de direction.
Avec des villes apprenantes sur plusieurs continents, ce réseau est très diversifié. Toutes les municipalités ne sont pas au même stade. Le but est d’échanger sur les bonnes pratiques et expériences de chacun. Chaque initiative s’inscrit en effet dans un paysage socio-économique unique au pays et à son développement politique, éducatif et culturel.
Tunis par exemple a mis la société civile au cœur de sa stratégie pour développer une ville apprenante. Pour atteindre cet objectif, Tunis offre par exemple au personnel municipal une formation intensive pour qu’il se sente concerné par la participation des citoyens en tant que partenaires de la ville. En outre, la capitale de la Tunisie équipe les associations avec les outils dont elles ont besoin pour se développer, devenir plus efficientes en étant en capacité de soutenir plus efficacement les citoyens dans leur vie quotidienne. « À long terme, Tunis vise à utiliser le lien de confiance qui a été établi entre la ville et ses citoyens comme une base saine et universelle au service de la cohésion sociale, culturelle et économique, » note un rapport de l’Unesco sur le sujet.
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- © Université Ouverte de la Fédération Wallonie-Bruxelles ASBL
Plus près de nous, Evry-Courcouronnes, au sud de Paris, met l’accent sur le partage des expériences et des savoirs. « Être une ville apprenante est une démarche où tout un chacun a la possibilité de rentrer et de collaborer. Chacun peut jouer un rôle dans une démarche d’éducation, d’instruction et par conséquent de socialisation (…). Toute personne, dès lors qu’elle a un peu d’expérience de vie, un métier, qu’elle maîtrise un savoir ou un savoir-faire technique, peut entrer dans cette démarche d’instruction, d’éducation et de socialisation d’autrui. Il s’agit de faire prendre conscience que chacun possède des savoirs qui peuvent intéresser quelqu’un d’autre », note le site internet de la ville. Un des axes de sensibilisation de cette municipalité ? Le partage de la culture scientifique. « Aimer et faire aimer la science, offrir la possibilité à des habitants d’en faire un métier, une passion ou plus simplement un bon moment de découverte et d’expérience partagé à l’école ou en famille… ». Voilà le but de plusieurs initiatives mises en avant par la ville.
Concrètement, Evry-Courcouronnes organise chaque année une Fête de la science, au cours de laquelle une centaine de scientifiques dispensent leur savoir de manière pédagogique, à travers des ateliers interactifs, des jeux ou encore des expérimentations en biologie, physique, biothérapie. Environ 3000 personnes y participent. « Vulgariser, c’est un véritable travail. Cela oblige à prendre du recul sur ses recherches. La Fête de la science fait partie de ces moments privilégiés pour expliquer ce que nous faisons. C’est l’occasion de montrer combien les sciences ont des applications dans notre quotidien, de partager les connaissances et de montrer la diversité des métiers et des formations scientifiques pour susciter des vocations », souligne Véronique Le Boulc’h, responsable Communication scientifique et citoyenne de Genopole, le premier « biocluster » français dédié aux biotechnologies.
Depuis 2020, la ville de Charleroi est la première et la seule ville belge à faire partie du réseau mondial des villes apprenantes de l’Unesco. Selon Virginie de Moriamé, Coordinatrice du projet Charleroi ville apprenante, « le but est de donner le goût et les moyens à chacun de s’approprier un nouveau savoir pour développer sa citoyenneté et s’inscrire en tant qu’acteur du développement de la région ». Cette « encapacitation » peut se faire à tous les stades de la vie. « A Charleroi, il y a l’université des enfants, pour sensibiliser les plus jeunes au monde universitaire, des cours de coding pour les 15-25 ans, de la sensibilisation à l’alimentation saine et durable, des jardins partagés, et bien plus encore ». Il existe de nombreuses initiatives, émanant autant du cadre de l’enseignement formel que du cadre associatif, culturel et du monde des entreprises. Les axes d’apprentissage privilégiés par Charleroi ? Education et développement numérique, culture, art et citoyenneté et enfin nature, territoire et développement durable. « In fine, nous visons un développement économique et un développement durable, une prospérité culturelle, une cohésion sociale, l’inclusion et la citoyenneté de manière générale », conclut Virginie de Moriamé, pour qui Charleroi regarde de manière optimiste vers l’avenir.