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« S’entraîner seulement avec son club n’est plus suffisant pour atteindre les sommets »

19 novembre 2020
par  François Garitte
( Presse écrite , Le virus du sport )

Drills propose des séances individualisées à des footballeurs professionnels.

Le soleil ne va pas tarder à se coucher du côté de Uccle, en ce mois de septembre. Sur un beau terrain synthétique bordé d’arbres, un groupe de 10 jeunes filles tapent dans le cuir sous le regard de leur entraîneur. Sur l’autre moitié de terrain, cinq footballeurs débutent leur échauffement, presque incognito. Parmi eux, quelques noms connus du football belge : Kevin Mirallas (ex-Antwerp), David Henen (Charleroi) ou encore Hasan Ozkan (ex-Ostende) se sont rejoints en bordure de Région flamande pour suivre un entraînement donné par Drills, une entreprise de performance footballistique gérée par un trio d’anciens footballeurs. « Après une formation en Belgique, j’ai rejoint une équipe en D4 allemande », explique Nii Okyne, le fondateur du projet. « Avec mon statut d’amateur, je devais avoir un boulot sur le côté. J’avais pas mal de contacts dans le football et j’ai décidé de lancer Drills en janvier 2019. »

Depuis, Okyne a été rejoint par Jordan Chenge, monté jusqu’en D2 avec les jeunes du RWDM, et Jordan Atheba qui a une petite carrière derrière lui. « Après avoir été formé à Anderlecht et au Standard, je suis passé par l’Atletico Madrid puis l’AEK Larnaca », explique-t-il. « J’ai aussi évolué en D2 espagnole, en France et en sélections nationales belges pour jeunes. Après plusieurs mauvais choix de carrière, je n’arrivais pas à revenir à mon niveau et j’ai choisi de m’investir à fond dans le projet. »

La répétition du geste

Un projet qui souhaite donner aux joueurs professionnels, mais aussi aux jeunes Elites, ce qu’ils ne reçoivent pas en club : des entraînements de perfectionnement individualisés. « En club, quand ils font des exercices de finition ou de passing, ils ne touchent pas autant de ballons qu’ici », avance Jordan Chenge. « Nous étudions quels gestes techniques et quels déplacements sont réalisés au plus haut niveau. Ensuite, nous créons des exercices par rapport à cela et en fonction de chaque joueur que nous avons en face de nous. Enfin, ces joueurs répètent un maximum de fois ces gestes. C’est cette idée de répétition et de travail individualisé qui manque en club. »
Sur le terrain, les cinq pros s’apprêtent à débuter la séance avec ballon après un long échauffement durant lequel rien n’est laissé au hasard. Le trio veut prendre le temps de bien préparer les joueurs pour éviter toute blessure qui leur ferait perdre en crédibilité. « Une de nos grandes fiertés est de ne jamais avoir eu un joueur blessé », avance Nii Okyne. « Avant qu’il ne parte à l’AC Milan cet hiver, Alexis Saelemaekers est venu s’entraîner chez nous. Imaginez un instant qu’il se blesse à ce moment-là... »

L’intensité augmente et la concentration est à son comble. Les joueurs travaillent leur finition deux par deux, du pied droit et du pied gauche, avec un système de répétition à haute fréquence mis en place par les trois coaches. « Peu de joueurs en Belgique ont un geste qui est leur marque de fabrique en terme de finition », continue Okyne qui prend l’exemple du jeu stéréotypé mais efficace d’Arjen Robben. « Tout simplement parce qu’on ne travaille pas en club sur la répétition de ces gestes. Or, avant de maîtriser un geste à la perfection, il faut atteindre un certain nombre d’heures. A la fin de la journée en club, le but est d’avoir un groupe solide. L’individu existe mais l’intérêt se trouve dans la globalité de l’équipe. Nous, nous prenons l’individu en essayant de lui rajouter un plus pour qu’il puisse ensuite apporter ce plus à son équipe. »

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© François Garitte
De grands noms du foot belge

Depuis les débuts de Drills, de nombreux footballeurs professionnels font confiance au trio, qu’ils appartiennent à un club ou qu’ils soient sans contrat. Defour, Mbenza, Leya Iseka, De Medina ou encore Vercauteren et Kayembe sont passés entre les mains des coaches pour se perfectionner de manière continuelle. D’autres comme Mutombo, Mbombo ou Nzita sont venus pour garder le rythme avant de retrouver une équipe. « Mardochée Nzita est un bon exemple », avance Nii Okyne. « Il ne jouait pas à Anderlecht et est venu faire des séances supplémentaires avec nous. Grâce à cela, il a ensuite reçu la confiance de son coach, est parti en Serie B à Pérugia et vient d’être sélectionné avec les U21 belges. Nous accueillons des gars qui sont demandeurs d’entraînements extras. Pour les joueurs sans club, cela permet de garder la forme afin d’être prêt quand l’occasion se présente. »

C’est le cas d’Hasan Ozkan, formé à Malines et à la Gantoise, et libre depuis son passage à Ostende. Le Belgo-Turc, très efficace sur le terrain d’entraînement ucclois, est un habitué des séances de Drills. « S’entraîner seul n’est pas la même chose », avance le joueur de 22 ans. « Ici, les coaches sont 3 pour 5 joueurs. Ils voient nos défauts et nous corrigent individuellement. Depuis l’âge de 10 ans, je fais du travail spécifique à côté des entraînements en club et c’est grâce à cela que j’ai réussi à passer des paliers dans ma petite carrière. »

Avec un encadrement professionnel, Drills parvient à offrir aux joueurs ce qu’ils sont venus chercher, créant un climat de confiance entre les coaches et les pros. « Si un joueur comme David Henen vient chez nous depuis 6 mois, c’est parce qu’on propose un vrai travail de qualité », conclut Jordan Atheba. « A l’heure actuelle, s’entraîner seulement avec son club n’est plus suffisant pour arriver au sommet car la concurrence travaille deux fois plus. Le spécifique améliore réellement le footballeur et l’aide à atteindre ses objectifs. »

Après une heure d’entraînement intensive, le soleil s’est désormais couché du côté de Uccle. Une nouvelle équipe de filles s’apprête à monter sur le terrain. Ballons en mains, ces joueuses passent à côté de l’ancien Diable Rouge Kevin Mirallas et de David Henen sans pour autant les reconnaître. Le lendemain, d’autres joueurs professionnels reviendront sur ce même terrain suivre les séances de Drills pour garder la forme ou perfectionner leur technique. Avec un objectif en tête : que leurs séances supplémentaires réalisées dans l’anonymat ucclois leur permettent de rapidement briller au plus haut niveau.

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