Quand Waremme "La Rouge" se teinte (un peu) en bleu 106 ans plus tard...
Retour sur la fin de la majorité absolue socialiste en place dans la capitale de la Hesbaye.
« Waremme, une petite ville à la campagne où il fait bon vivre… » : ainsi les édiles politiques locaux se plaisent-ils depuis plusieurs années désormais à qualifier celle qui est vue comme la capitale de la Hesbaye. Laquelle, entre autres particularités, présente notamment celle d’être dirigée, du moins jusqu’il y a peu, par une majorité absolue socialiste, et ce depuis 106 ans… A cet égard, pour une commune de taille moyenne, elle fait figure d’exception en Wallonie, bien que le Parti socialiste y soit toujours dominant.
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- Le collège communal de la Ville de Waremme.
- © Bruno Boutsen
Cette longévité que l’on peut qualifier de remarquable a donc été interrompue à la fin du mois d’août dernier, à la veille de la rentrée de septembre et entre deux confinements liés à la pandémie de Covid-19. De quoi faire passer ce petit événement politique assez inaperçu même s’il n’en demeure pas moins symboliquement important. Ce n’est en effet pas tous les jours que l’on assiste à pareille ouverture d’une majorité qui n’a durant plus d’un siècle pu compter que sur elle-même, ce qui visiblement l’arrangeait bien.
« Un mariage de raison »
Preuve du caractère relativement exceptionnel de ce basculement politique récent : la présence lors de la séance du conseil communal au cours duquel la nouvelle majorité a été installée de l’actuel président du MR lui-même qui avait fait le déplacement. Car c’est bel et bien avec les libéraux waremmiens que le PS local a conclu un « mariage de raison ». Lequel a d’ailleurs été placé sous la tutelle des deux fédérations respectives et a été rendu nécessaire par le dépôt au préalable d’une motion de méfiance constructive.
L’adoption de cette dernière, majorité PS-MR contre opposition Waremme Alternative, a été qualifiée de « jour historique » par les uns et les autres. Yves Berger, leader de celle qui fait désormais figure d’unique opposition voulue citoyenne, déplorant d’emblée « un retour de la particratie ». Du côté des deux nouveaux partenaires, on lui préférait alors le caractère jugé « légitime et stable » de la nouvelle majorité, intégrant au collège communal un seul échevin Pour Waremme en la personne du libéral Raphaël Dubois.
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- Raphaël Dubois, le nouvel échevin libéral.
- © Marjorie Goffart
Lequel est donc le premier non-élu socialiste à faire partie de ce dernier depuis plus de cent ans, ce qui n’est bien entendu pas de son seul fait même si le principal intéressé, soutenu par son parti, avait entamé un rapprochement avec les socialistes. Du moins en l’espèce avec le bourgmestre Jacques Chabot, et ce après avoir pourtant tancé l’absence d’ouverture de la majorité après le scrutin de 2018. La liste qu’il tirait totalisant près de 30 % des voix, un plafond selon lui, alors même que le PS dépassait à peine les 50 %.
Il faut dire qu’en deux années, de l’eau a coulé sous les ponts et la vie politique locale a été marquée par « l’affaire Gérard » du nom du désormais ancien Premier échevin. Sans refaire ici toute l’histoire, laquelle a été racontée de manière différente, il a été victime selon les uns d’« une accumulation d’erreurs » dans sa gestion ou selon les autres d’« une stratégie politique ». Toujours est-il que cette véritable saga politique a connu son aboutissement fin 2019 avec l’exclusion du PS et le remplacement de ce dernier.
Le début d’un chant du cygne ?
S’il convient bien sûr de relativiser la portée de cet événement, l’élu en question étant devenu depuis lors indépendant de même d’ailleurs que l’ancien chef de groupe PS-IC Laurent Moor, d’aucuns y voient le début d’un chant du cygne pour les socialistes ou en tout cas un risque important pour ces derniers. Lesquels, depuis Guillaume Joachim en 1914, ont toujours régné de main de maître sur la Ville de Waremme qui a ensuite été dirigée par deux « hommes forts » que sont Edmond Leburton ainsi que Guy Coëme.
La présence de personnalités de cet acabit est d’ailleurs mise en avant afin d’expliquer le maintien au fil du temps de la majorité absolue socialiste. C’est en tout cas ce que constate le socialiste Robert Meureau, ancien échevin et député qui a mis un terme il y a peu à sa carrière. Quant au maïeur actuel Jacques Chabot, lequel a bien connu ses deux prédécesseurs, il a certes été député mais il s’est recentré sur la vie politique locale et assume actuellement son dernier mandat en tant que bourgmestre à la tête de la Ville.
Une évolution jugée « inéluctable »
Pour notre interlocuteur, acteur et observateur avisé, une autre raison de cette stabilité tient au fait que des dossiers importants tels que celui du centre sportif ou du zoning de Waremme mettent plus d’une législature à se concrétiser. Quant à l’ouverture récente de la majorité, il la juge « inéluctable » compte tenu de l’évolution démographique et sociologique de la Hesbaye. Une évolution que le nouvel échevin libéral met lui aussi en exergue, faisant référence aux « 20 % de nouveaux électeurs entre 2012 et 2018 ».
Malgré cela, selon Robert Meureau, « la recette socialiste continue de fonctionner ». Et, faisant référence à l’histoire et aux effets conjoints tant de la proximité directe de l’autoroute E40 (voulue par Edmond Leburton) que de la présence d’une gare le long de la ligne 36, d’évoquer « un développement immobilier maîtrisé » d’une commune qui doit néanmoins compter comme les autres avec les réglementations urbanistiques. Au sujet de l’érosion récente de son parti, il en appelle à l’émergence d’un nouveau leader.
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- Yves Berger, le leader de l’opposition.
Leadership et « clientélisme »
D’ici aux élections de 2024, la nouvelle majorité rouge et bleue devra donc aussi faire avec une opposition qui ne lâchera rien, bien que son poids est relativement limité. Son leader avait d’emblée annoncé la couleur avant même le dépôt de la liste associant des candidats non-étiquetés et d’autres d’obédiences humaniste et écologique. Et ce dernier de pointer à son tour la succession de « trois générations de leaders charismatiques » en reconnaissant au fil du temps « un développement globalement positif de la cité ».
La propension des édiles locaux à penser « de gauche » mais à pratiquer une gestion disons plus consensuelle est également épinglée par cet ancien commandant des pompiers. Lequel évoque aussi l’incapacité de l’opposition de présenter des candidats assez forts. En outre, il dénonce « un clientélisme » qui est vue comme « une constante ». Pour Yves Berger, « la majorité vit sur l’inertie d’un système qu’elle ne maîtrise plus » et l’arrivée du MR ne s’est faite selon lui que grâce à l’absence de renouvellement au PS.
Disant ne pas croire sauf surprise (qui pourrait être constituée par le retour en politique du socialiste Vincent Mignolet) à l’arrivée d’une personnalité providentielle, il prédit « la fin de sa grandeur à Waremme ». Et ce malgré l’accord conclu avec le MR, lequel a des répercussions inédites sur la gestion du Home waremmien (la société de logement public fondée par le PS et que le MR va présider). De son côté, reconnaissant une part de naïveté, le nouveau venu dit quant à lui préférer les projets aux questions de personnes.
« Waremme, une petite ville à la campagne où il fait bon vivre… ». To be continued…