Première vague : gestion de crise à Manhay
Le 6 mars 2020, le bourgmestre de Manhay est informé, en fin de soirée, qu’une habitante de sa commune est touchée par la Covid-19. C’est le premier cas en Province de Luxembourg.
Premier trimestre 2020. Première vague de Covid-19. De nombreuses interrogations. Des cas qui se recensent çà et là. Partout, sans trop savoir à quoi s’attendre, on sait que le virus fera son apparition, s’il ne s’est déjà pas installé, insidieusement. Le vendredi 6 mars, vers 23 h 30, le bourgmestre de Manhay, Marc Generet, est informé qu’un cas est détecté dans sa commune. Il s’agit du premier recensé officiellement en province de Luxembourg. C’est une dame, une septuagénaire, qui est touchée. D’abord acheminée à l’hôpital de Marche-en-Famenne, elle est rapidement transférée au CHU Saint-Pierre à Bruxelles. Si elle ne revenait pas d’une zone qualifiée « à risque, » comme l’Italie par exemple, tous soulignent qu’elle avait une vie sociale très active. « A cette date, nous sommes à une semaine de la fameuse conférence de presse du Gouvernement qui annonce le confinement »se remémore Marc Generet.
« Garder son sang-froid »
Son équipe opte d’emblée pour la transparence : une conférence de presse est organisée le samedi dans l’après-midi, en la maison communale de Manhay. Le bourgmestre l’affirme : « Il fallait garder son sang-froid non seulement face à la famille touchée, mais aussi face à notre population. A l’époque, je me souviens avoir dit qu’il ne fallait pas « verser dans la sinistrose. » Il était en outre important ne pas minimiser les choses, tout en étant rassurant. Nous en avons appelé au bon sens, à la prudence élémentaire. Notre objectif était également d’informer la population sur ce qui était mis en place et comment nous envisagions les choses. » Rien n’est encore, d’autorité, annulé dans la commune. Plusieurs associations locales décident cependant, par prudence, de ne pas mettre sur pied leurs activités. Marc Generet, lui, compte sur une certaine « union sacrée » de toutes les forces vives de sa commune, autant sur le plan politique que sur le plan de la population lato sensu. Ce sera le cas. « Rien n’était possible seul. Rien n’est d’ailleurs possible lorsque l’on est seul »exprime-t-il.
Atouts majeurs
Le collège de Manhay -avec en son sein plusieurs « novices » en place depuis décembre 2018- possède un atout majeur : celui de compter dans ses rangs un médecin généraliste, le docteur Patrick Loos : « Avoir un avis médical était évidemment quelque chose d’important, tout en étant rassurant. Il nous a apporté beaucoup, tout comme à la population. Impossible de dire si nous aurions pu gérer ce premier cas de la même façon s’il n’avait été là » glisse le mayeur de Manhay. « Il fallait garder les deux pieds sur terre. La population nous a confié une mission. Nous sommes là pour les bonnes et les mauvaises choses. Une crise sanitaire était quelque chose de totalement inédit, sans aucun précédent. Il ne fallait pas se précipiter mais prendre des décisions claires. La population, dans une crise, doit pouvoir se reposer sur ses élus. Pour nous, il ne fallait pas céder à la panique. La peur est le pire des maux. Il ne fallait pas non plus glisser dans l‘émotionnel, mais bien être très clairs » enchaine-t-il. Autre allié plus qu’important dans cette gestion de crise, le Gouverneur de la province de Luxembourg, Olivier Schmitz : « Si de nombreuses questions se faisaient jour, il ne fallait aucunement créer un précédent ou agir avec précipitation. Dès l’annonce du cas dans notre commune, le Gouverneur et ses services ont été à nos côtés, nous ont épaulés très efficacement. »
Réponses en direct
L’annonce du premier cas passé, Manhay, comme toute la Belgique se confine. Les élus se retrouvent une nouvelle fois en première ligne. Les questions fusent, les mandataires sont régulièrement interpellés. L’idée nait d’organiser un live via Youtube : son but ? Répondre aux –nombreuses- questions de la population. La séance est prévue le 24 mars. Elle commencera avec un peu de retard : « Nous avions une peur bleue. C’était un exercice inédit pour nous. Le stress était là. Nous n’avions pas droit à l’erreur. N’ayant pas de prompteur, j’avais placé une grande feuille devant moi pour présenter la soirée. Les essais avaient été positifs. Au moment de passer au direct, un problème technique ! Heureusement, il a été vite résolu. Nous avons étudié toutes les questions, répondu au plus grand nombre » explique Marc Generet. Les questions sont d’ordre médical mais touchent également la vie quotidienne : des garderies scolaires au ramassage des PMC, de nombreux sujets sont abordés. « Il était important de garder le contact, de répondre à l’attente et aux interrogations des gens. Parallèlement, pour ne laisser personne sur le côté, nous avons également communiqué via des toutes-boîtes »poursuit-il. Dans ses souvenirs, il ne garde en mémoire « aucun retour négatif. ». Si vous l’interrogez sur son sentiment sur ce premier cas dans la province de Luxembourg, sur cette première vague, il n’hésite pas : « Je résume cette expérience par un mot : celui de solidarité. L’intelligence de l’homme est de s’adapter, de s’organiser, dans le but unique de sortir de cela. A tous les niveaux, chacun a apporté sa pierre à l’édifice. Sur le plan autant politique que citoyen. Je ne cite ici que l’élan de générosité pour confectionner les masques et les distribuer. Mais il n’est pas le seul. »