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Le port du masque est obligatoire !

28 août 2020
par  Christian Du Brulle
( Presse écrite , Le virus de l’invention )

Sur la digue, dans les rues commerçantes, les transports publics, les musées, les sites touristiques, les marchés, le long de la Semois à Bouillon… Cet été, avec le Covid-19, le port du masque est devenu obligatoire dans des périmètres aussi nombreux que variés. Y compris en plein air.

Même si fin juillet, la Première ministre Sophie Wilmès (MR), qui encourageait le port du masque rappelait aussi qu’il ne remplaçait pas le respect des gestes barrières (distanciation, lavage des mains, etc.), pourquoi imposer la quasi généralisation de son usage ?

Une barrière mécanique efficace

« Un masque est avant tout un filtre porté devant le visage », indique le Pr Jean-Luc Gala, spécialiste des maladies infectieuses et directeur du Centre de technologies moléculaires appliquées à l’Université catholique de Louvain (CTMA-UCLouvain). « Il peut avoir deux fonctions : protéger le porteur ou protéger son entourage ». Le port du masque empêche la personne contaminée de disséminer le virus tandis qu’il protège la personne non contaminée d’une éventuelle contamination. Quand on sait que pour le COVID-19, le nez est à la fois la porte d’entrée du virus dans l’organisme et sa source de diffusion principale, avant même que le patient ne devienne symptomatique, il est essentiel d’établir la première ligne de défense à ce niveau-là ».

Cette barrière mécanique à la transmission du virus est-elle réellement efficace ? Les masques artisanaux, cousus par des milliers de couturières volontaires en Belgique dès le début de la pandémie pour faire face à la pénurie de masques chirurgicaux, FFP2 et FFP3, ont-ils une réelle utilité ?

Le Pr Gala en est persuadé. Et il n’est pas le seul. Une image valant mieux qu’un long discours, voici une séquence de photos illustrant la dispersion de gouttelettes et leur « aérosolisation » dans différentes situations : une conversation (avec émission de postillons), une toux et un éternuement. Ce montage illustre le travail de six chercheurs de Sydney (Australie), publié fin juillet 2020 dans la revue scientifique « Thorax ». Il compare la distance et le volume de gouttelettes et aérosols émis sans masque protecteur, avec un masque en tissu composé d’une unique couche, avec un masque en tissu à deux couches et finalement lors du port d’un masque chirurgical.

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Les photos provenant de séquences vidéos filmées au ralenti sont limpides. Les masques artisanaux, même ceux composés d’une seule couche de tissu, limitent l’émission de gouttelettes potentiellement chargées en virus. Le masque en tissu à deux épaisseurs étant cependant plus efficace.

Surtout ne pas porter le masque "sous" le nez

« Une simple conversation provoque l’émission de microgouttes que l’interposition d’une seule épaisseur de tissu empêche déjà nettement", confirme le Pr Gala. Dès le début de la pandémie en Belgique, il a régulièrement encouragé la fabrication de ces masques citoyens et leur (bonne) utilisation. « Une minute de parole peut ainsi produire de 1.000 à 100.000 microgouttes », précise-t-il. "Celles-ci peuvent voyager loin, très loin, si elles ne sont pas arrêtées par un masque. Jusqu’à 6 à 9 mètres », précise le médecin.

« La taille de ces microgouttes se réduit rapidement par évaporation. Ce qui leur permet de se maintenir en l’air, en aérosol, pendant des durées allant de 8 à 14 minutes. Le masque artisanal à deux couches de tissus est donc intéressant pour arrêter ces microgouttes, note-t-il encore. « Il l’est encore davantage s’il est muni d’un filtre interne remplaçable, notamment électrostatique ».

Si une seule couche de tissu intercepte déjà une grande partie des particules plus grandes que trois microns (millionième de mètre, ceci n’est toutefois vrai que pour autant que le masque soit bien ajusté. "Ces valeurs s’effondrent si le masque n’est pas bien ajusté, quel que soit le type de masque", note le médecin. 


« Le masque doit couvrir le nez, la bouche et le menton », rappelle-t-il. "Si les narines sortent du masque, elles le contaminent massivement sur sa face extérieure. Lorsqu’on remet ensuite un tel masque correctement, il devient un nébuliseur de virus ! Même chose si on porte un moment le masque autour du cou puis qu’on l’enfile à nouveau !"

Rappel visible d’un danger invisible


Bien entendu, ces masques demandent à être posés, portés et enlevés de manière correcte. Et ils doivent être lavés régulièrement, avec du savon, et rincés à 60 degrés.

À ces quelques arguments (qui sont repris dans un long document renvoyant vers les publications scientifiques récentes sur le sujet), le médecin et son collègue Professeur Émérite d’anesthésiologie Philippe Baele (UCLouvain) ajoutent encore quelques dimensions sociologiques à l’importance de porter un masque en cas de pandémie due à un virus respiratoire. "Le port du masque responsabilise chacun, il crée le sentiment que chacun peut devenir acteur d’un combat plutôt que de subir passivement un événement que l’on ne maîtrise pas", estiment-ils. "Son usage limite les gestes souvent inconscients qui font que nous nous touchons la bouche ou le visage avec les mains. Mais surtout, le port du masque constitue un rappel visible et permanent de l’existence d’un danger qui, lui, est invisible ».

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