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Garder le contact pour éviter la crise de foi

6 août 2020
par  Jean-Michel Bodelet
( Presse écrite , Le virus des héros comme des gens ordinaires )

Les offices religieux ont repris avec des règles sanitaires strictes et une assistance limitée. Alors que les sondages font part d’une perte de vitesse de la pratique religieuse, cette crise du COVID-19 a-t-elle sonné le glas de cette pratique ? A-t-elle détourné les fidèles ? Comment cette église a-t-elle vécu les premiers mois de la crise du COVID-19 ? Et ce notamment dans les régions rurales, là où elle est traditionnellement plus ancrée ? Comment les autorités religieuses ont-elles appréhendé une éventuelle crise de foi ?

Églises ouvertes mais…

Pour tenter des répondre à ces interrogations, un bond dans le temps est indispensable. Le jeudi 12 mars, alors même que la Première ministre Sophie Wilmes annonçait les premières mesures de confinement, la conférence épiscopale belge, organe rassemblant les évêques de notre pays, prenait plusieurs décisions. Parmi ces dernières, la plus marquante était celle de supprimer les messes : « A partir de ce samedi 14 mars et jusqu’au 3 avril au moins. » Tout en précisant « Les églises resteront ouvertes pour permettre à chacun d’aller y prier. » Pour les croyants, c’est un véritable séisme. Jamais, dans l’histoire récente, l’autorité ecclésiastique n’avait suspendu ses offices. Même aux heures les plus sombres. En plein carême, les chrétiens se voyaient privés d’eucharisties. Pour les autres offices, le communiqué du 12 mars précise : « Les baptêmes, mariages et funérailles pourront se dérouler en cercle restreint. » Ces dernières mesures évolueront avec le temps.

Évêques et prêtres 2.0

Les prêtres sont en première ligne. Outre le fait de répondre aux nombreuses interrogations, inquiétudes des fidèles, une de leurs premières préoccupations est, en cette période, de garder le contact. Contact avec les fidèles, avec les malades. La conférence épiscopale ne dit d’ailleurs rien d’autre lorsqu’elle renvoie vers les sites web, notamment Cathobel, KTO, et vers les célébrations diffusées via la télévision ou la radio. Derrière ces canaux connus existant avant la crise sanitaire, on voit fleurir des initiatives privées, émanant de prêtres ou d’unités pastorales. Via les réseaux sociaux, des célébrations sont diffusées en live, avec plus ou moins de réussite. Avec ce mode de communication, l’interaction est possible : même si la technique n’est pas toujours au rendez-vous, la majorité des commentaires sont positifs. Ce qui plait chez les internautes, c’est la proximité, ce sentiment d’être proche du prêtre que l’on connait. Du prêtre ou même de l’évêque. Ainsi, Monseigneur Pierre Warin, évêque de Namur-Luxembourg est filmé célébrant les messes du Triduum pascal. Les offices sont ensuite diffusés sur le net et les TV locales. Il n’est pas le seul. Évêques et prêtres passent au 2.0 ! Chose improbable avant cette pandémie.

Symbole

Garder le contact, c’est également proposer des lectures, des prières, des commentaires ou encore des actions communes. Exemple le 25 mars avec la fête de l’Annonciation. Journée où « Le diocèse de Namur invite tous les chrétiens et, au-delà tous les hommes et femmes de bonne volonté à exprimer, par un geste, leur communion et leur soutien avec tous ceux qui souffrent de la pandémie du coronavirus et avec tous ceux qui s’engagent à la combattre : médecins, infirmiers, soignants, pharmaciens, forces de l’ordre, chercheurs… » Garder le contact, c’est aussi s’entretenir avec les personnes le plus vulnérables. Dans l’unité pastorale de La Roche-en-Ardenne, par exemple, au secrétariat du doyenné, on ne compte plus les coups de fil donnés aux personnes âgées, aux isolés…

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Le port du masque est maintenant obligatoire lors des cérémonies religieuses.
© Jean-Michel Bodelet
Prêtres sous un autre jour

Les initiatives locales sont nombreuses et les diocèses sont également partie prenante. Ainsi, dans celui de Namur-Luxembourg, on ne chôme pas : « Nous n’avons pas levé le pied et cela a été humainement très très riche » nous confie-t-on du côté de la cellule communication dudit évêché. On enchaine : « Nous nous sommes chargés de relayer les différentes informations officielles vers les acteurs pastoraux. » Second objectif : faire connaitre les initiatives locales : « Le but était de montrer la créativité des prêtres, des unités pastorales, de montrer à tous ce qui se faisait dans les paroisses du diocèse en ce temps de pandémie. » Enfin, des axes plus « magazines » voient le jour : « Nous avons décidé de présenter nos prêtres sous un autre aspect. Ainsi, un prêtre passionné de course à pied nous présentait ses conseils pour faire du sport. Un autre, cuisinier, nous proposait des recettes. »

Le temps devient long

Si l’on fait preuve d’imagination, si on se sert des moyens de communications modernes, il faut tenir dans la durée. Et ce temps semble long autant pour les ministres du culte que pour les fidèles. Pas de dimanche des rameaux, pas de semaine sainte, pas de fête de Pâques. Les confirmations et communions sont reportées. La volonté de reprendre les offices « Dans le respect des normes sanitaires » se fait de plus en plus pressante. Les 28 avril et 5 mai, les évêques de Belgique expriment ce souhait. Il n’en sera rien. Pas d’Ascension. Alors que le déconfinement est en marche dans de nombreux secteurs, tous espèrent une embellie pour la Pentecôte. Ce ne sera pas encore le cas. Le doyen de La Roche-en-Ardenne manifeste son mécontentement en invitant les églises de son secteur à sonner le glas, symbole de deuil, en ce dimanche. Il sera suivi dans d’autres doyennés. Le premier dimanche « post confinement » sera celui de la Fête-Dieu, le 14 juin. Les consignes sont strictes. Elles seront renforcées dernièrement avec le port du masque obligatoire. D’un premier constat, les fidèles n’ont pas déserté les églises. Il n’y a pas eu de crise de foi. Bien au contraire affirment certains.

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