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Des liens de solidarité plus forts que le Coronavirus chez Natu’Run

19 juin 2020
par  Nicolas Gimenne
( Presse écrite , Le virus du sport )

Les coureurs de Natu’Run ont vaincu la période de confinement et le Coronavirus grâce à des liens forts de solidarité. Très fréquenté par les professions médicales, ce club de trail s’est organisé pour adapter sa reprise face aux recommandations du Conseil national de sécurité.

Une douche froide s’est abattue sur les mollets des coureurs de Natu’Run au mois de mars dernier lorsque le Conseil national de sécurité a pris la décision d’interdire les activités sportives en groupe. Dans ce club qui rassemble les amateurs de trails en pleine nature, l’idée d’être privé des rencontres avec les autres membres et des sorties dans des étendues infinies a été perçue comme un coup d’arrêt.

Une dynamique s’est alors spontanément mise en place entre les membres durant le confinement. A force de défis lancés par les coaches, le groupe a préservé des liens de solidarité et a maintenu un bel enthousiasme dans ses rangs pourtant confinés.
"Poussés par nos membres, nous avons établi un certain nombre de défis, détaille le responsable Christophe Leunen. Il s’agissait de se photographier dans des situations ou des endroits particuliers, d’atteindre un quota hebdomadaire de kilomètres ou de dénivelé positif ou encore d’aller chercher des points comptabilisés sur la qualité des sorties individuelles. Nous avons été surpris par l’enthousiasme que cela a généré. Natu’Run, c’est une bande d’amoureux du running/trail qui, avec l’envie de s’améliorer, n’hésite pas à réaliser des défis farfelus. Malgré l’éloignement physique, nous avons vécu de chouettes moments collectifs. Cela nous a permis de rester proches. Si vous mélangez le sport, l’ambiance la bonne humeur, la rigolade et l’entraînement, vous obtenez un super cocktail qui forme la réussite et la solidarité d’un groupe."

Affronter la crise

Parmi les membres de Natu’Run figurent plusieurs professions médicales. Ces pratiquants ont perçu la crise de manière très différente. Ils l’ont aussi affrontée et luttant avec leurs patients contre le Coronavirus.

"Même entre spécialistes du milieu médical, nous avons subi cette crise du Covid avec des perceptions différentes, explique le Dr Pascal Wiame, médecin généraliste et spécialiste de la médecine sportive. On peut le voir sous l’angle du médecin spécialiste hospitalier pneumologue ou réanimateur qui n’a plus eu une seule minute à lui afin de s’occuper de ses patients quasiment 24 heures sur 24. Ou selon l’angle du médecin généraliste. Lui, il n’a plus pu voir ses patients. Il devait ne pas les contaminer et ne pas se contaminer. Il a dû être disponible pour tâcher de résoudre pratiquement tous les problèmes par téléphone (sauf les urgences vitales). Quel stress de commettre une erreur ! On voyait tout au plus un patient par jour alors qu’on donnait une vingtaine de consultations téléphoniques."

Dans ces conditions, les professions médicales présentes au sein de Natu’Run ont été les premières à "décrocher" et à tourner le dos aux sorties individuelles d’’entraînement.

"Au début du confinement, on manque d’envie, explique le Dr Wiame. Le boulot et les nouvelles sont déprimants. Puis, on se reprend doucement et on va courir seul en respectant une distance d’un kilomètres autour de chez soi. Si on croise un vélo, on tourne la tête et… on râle un peu si on voit trois personnes ensemble. On pense alors que ces gens n’ont rien compris…"

Au mois de mai, lorsque le Conseil national de sécurité a autorisé la reprise des activités sportives en groupe, les sportifs avaient des fourmis dans les jambes. L’euphorie qui s’est manifestée à l’annonce d’une possible reprise a très vite fait place à une réflexion sage parmi les responsables afin de limiter les risques d’infection parmi le groupe.

"Au début, nous pensions qu’il était idéal de faire une sortie groupée afin de renouer les contacts et de papoter tous ensemble après cette longue période d’interruption, détaille le coach Christophe Leunen. Nous souhaitions aussi respecter les règles imposées et nous ne voulions pas être catalogués de profiteurs face à ces nouvelles autorisations. Plusieurs membres, impliqués dans leur profession médicale, nous ont alors fait remarquer qu’ils n’étaient pas spécialement à l’aise face à la perspective d’une reprise en groupe. En réalité, on ne s’attendait pas à une accalmie aussi rapide…"

Une reprise mesurée

Face à des envies parfois précipitées chez ses adeptes, Natu’Run s’est adapté et s’est surtout appuyé sur les consignes médicales de ses membres éclairés pour dessiner les contours de son plan de reprise.

"Au début de la crise, les coaches n’avaient pas besoin d’avis, rappelle le Dr Wiame. Jean-François Rondiat, le coach qui est aussi policier, avait été bien drillé de par sa profession. Ensuite, à l’annonce de la reprise, tout s’est accéléré sans doute trop vite. Dans la perception générale, on a eu tendance à confondre la pratique du sport à vingt sur un terrain de foot en se tenant éloignés les uns des autres et la pratique du trail à vingt sur des chemins étroits. C’était une absurdité ! On doit se tenir à quatre ou cinq mètres l’un de l’autre quand on hyperventile lors du sport. Courir par groupes de vingt était une idée folle. Mais l’écoute des coaches a été immédiate, comme leur réactivité. De petits groupes de cinq sportifs ont été créés lors des premiers jours de la reprise collective des entraînements. Ces petits groupes se sont ensuite étoffés, vu la bonne évolution de la maladie. Les coaches se sont bien adaptés. Félicitations à eux !"

Natu’Run s’est surtout illustré en proposant une reprise sportive qui allait au-delà des normes établies par le Conseil national de sécurité. Les sorties se sont réalisées par groupes limités tandis qu’une attention particulière était accordée aux normes sanitaires de distanciation.

"Ce n’est pas facile de faire plaisir à tout le monde et de satisfaire les personnes qui éprouvent le besoin de se défouler après une longue interruption, ajoute Christophe Leunen. Nous avons pris la décision de nous démarquer des normes édictées par le CNS en les renforçant. Diriger un groupe en qualité de responsable, ce n’est pas juste venir, déballer un parcours et rentrer chez soi. C’est aussi s’occuper de chaque personne qui en éprouve le besoin. L’esprit d’équipe va bien plus loin que les sentiers. Les solutions dégagées ont rencontré les envies de nos membres et ont eu le mérite de préserver leur santé."

Natu’Run n’a jamais aussi bien porté sa devise : "Seul, on va plus vite. Ensemble, on va plus loin".

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